Collection "Fabius Frères" : une des ventes du siècle
Cette vente sera une des plus prestigieuses du siècle assurément. Pour l’événement, la galerie Charpentier se trouve réquisitionnée par deux des principaux intervenants du marché de l’art à Paris : Sotheby’s et PIASA, conjoints pour l’occasion. Rue du Faubourg Saint-Honoré, la galerie Charpentier a été la plus célèbre des salles de ventes de la Belle époque du marché de l’art en France avant la guerre. L’espace a été rendu à sa vocation ses dernières années et elle accueille des ventes de haute volée. C’est là que du 13 au 17 octobre seront tout d’abord exposés les 385 lots de la collection « Fabius Frères » avant leur dispersion, depuis les mêmes lieux, dix jours plus tard, les 26 et 27 octobre.
Que de magnifiques tableaux, sculptures, mobiliers, vases, lampes… y seront déployés avant d’être proposés aux collectionneurs internationaux et aux plus grands musées ! Un catalogue de plus de 400 pages excellemment enrichi de notices en donne un aperçu alléchant. Ces chefs-d’œuvre somptueux proviennent du fonds constitué par les Frères Fabius, qui ont déjà marqué l’histoire de l’art en donnant aux plus grandes institutions l’occasion d ‘acquérir des pièces maitresses comme « La Madeleine pénitente » de Georges de La Tour ( on l’appelle aussi « La Madeleine Fabius «), acquise par André Fabius en 1936 et cédée en 1964 à la National Gallery of Arts de Washington ; le « Napoléon III » de Jean-Baptiste Carpeaux qui est au Metropolitan Museum de New-York ou, du même ciseau, le « Le prince impérial et son chien Nero » que l’on peut admirer au musée d’Orsay à Paris.
Flash back. En 1882, à dix-huit ans à peine, Élie Fabius ouvre au 3, rue de Provence, une boutique d’antiquités en lieu et place du magasin de mode que ses parents venus de l’Est de la France avaient installé dans ce quartier bouillonnant. Il est passionné par la saga napoléonienne et se spécialise dans les souvenirs de l’Empire. Très vite, dans le Paris de la Troisième République, il se fait un renom et parmi ses habitués figurent les princes du sang Louis et Victor ; les grands noms de la noblesse ou de haute bourgeoisie comme les Marmottan ou le baron Gourgaud. Sur sa lancée brillante, Élie Fabius est, en 1927, un des principaux acquéreurs de la vente aux enchères de la succession de l’impératrice Eugénie. Sa clientèle s’est étoffée. Elle est internationale. Européenne, américaine surtout. La guerre, l’occupation, l’aryanisation mettront un terme à cette aventure. Élie meurt en 1942. Mais plusieurs de ses fils ont déjà suivi les pas de leur père. L’aîné, Emmanuel, en devenant expert et marchand en autographes et manuscrits. Les trois plus jeunes, Fernand, Pierre et André en créant en 1937 leur propre commerce d’antiquités, 152, boulevard Haussmann, sous l’enseigne « Fabius Frères ». Leur domaine est celui des œuvres de Carpeaux et de Barye, les extraordinaires sculpteurs du XIX ème siècle ; des maîtres anciens de la peinture ; des mobiliers du XVIIIème siècle…
Après la guerre, après maintes actions familiales dans la Résistance intérieure, le « magasin » ( comme ils disent dans la famille pour parler de la galerie d’art) des « Frères Fabius » revient en pointe sur la marché des œuvres d’art. L’un des deux fils d’André (1908 -1984), François, né en 1944, champion de France de concours hippique en 1962, membre de l'équipe de France d'équitation de 1962 à 1972, vedette de l’équipe de France de concours complet lors jeux olympiques d’été de Munich en 1972, entre dans l’entreprise dans les années 70. Il s’affirme comme un des spécialistes mondiaux les plus réputés de la sculpture du XIXème siècle. Frappé par un cancer, il disparait en août 2006. Son frère Laurent, son cadet de deux ans, a emprunté un autre parcours que nul n’ignore : la politique. Mais, ce fervent amateur d’art, auteur l’an dernier d’un livre sur l’art, ''Le Cabinet des douze'', reste fidèle aux passions de ses aïeux. Actionnaire de la galerie où travaillait son oncle, son père, son frère, il devient, en 2008, actionnaire de la belle maison de vente PIASA avec plusieurs de ses amis les plus proches: Claude Berda, Christian Blanckaert, Michel Cicurel, Jérôme Clément, Jean-Michel Darrois, Charles-Henri Fiilippi, Jean de Kervasdoué, Marc Ladreit de Lacharrière, Patrick Ponsolle, Serge Weinberg, Louis Schweitzer, Lionel Zinsou et Orla Noonan. Rassemblés, ils reprenant 60 % du capital de PIASA cédés par Artémis, la société de François Pinault qui l'avait rachetée des années auparavant. Jérôme Clément, l'ancien patron d'Arte, est le président du conseil d'administration de PIASA. Ainsi, se poursuit la saga artistique de la famille Fabius.
L'aventure continue ailleurs que sur le boulevard Haussmann où le « magasin » n’est plus qu’un souvenir. Mais demeure jusque là la collection amassée au fil des temps. La famille a décidé de s’en défaire et de la proposer aux amateurs du beau. Les plus exigeants y trouveront de quoi nourrir leurs ambitions d’acheteurs.
Du côté de chez Carpeaux, émerge le superbe ensemble de marbres, « Jeune fille à la coquille » et « Pêcheur à la coquille » ( de 1873 ), sur socles en chêne estimé de 800 000 à 1 200 000 € et le groupe « Daphnis et Chloé » ( de 1874 ) en marbre blanc, estimé de 1 000 000 à 1 500 000 €. Passionnant aussi l’esquisse en plâtre de « La Danse », le groupe monumental dont l’original a décoré la façade de l’Opéra de Paris ( estimé de 80 000 à 120 000 €)… ( estimé de 80 000 à 120 000 €)… ( estimé de 80 000 à 120 000 €)…
Du côté de chez Barye, c’est une ménagerie, sculptée par cet autre Michel-Ange, comme le suggérait Théophile Gautier. Elle est peuplée de taureaux, éléphants, lions, tigres, jaguars, loups, ocelots… dans des tailles très variées et des estimations selon les objets allant de 4 000 à 30 000 €. Un « Thésée combattant le Minotaure » de 1843, est estimé de 200 000 à 300 000 €.
Il y a aussi une profusion de tableaux et de dessins de Carpeaux, de Barye, de Hubert Robert, Claude Gillot, Meissonier, Princeteau, Carolus Duran, Chéret, Henri Cros… Un tableau de Jean Béraud, « À la salle Graffard » de 1884, évoquant des personnages de la Commune et Louise Michel est estimé de 350 000 à 500 000 €…
Parmi les meubles les plus intéressants on peut admirer une commode attribuée à André-Charles Boulle. En placage de bois de violette et de palissandre, bronzes dorés d’époque Louis XIV, datée 1710, elle est estimée de 300 000 à 500 000 €. Une bibliothèque Napoléon III, en bois noirci, signée Diehl, est estimée entre 100 000 et 120 000 €. Un bureau plat à caissons en acajou d’époque Louis XVI, attribué à Riesener est estimé entrée 60 000 et 90 000 €. Un secrétaire à abattants, en marqueterie de fleurs et placage d’ébène et de bois noirci d’époque Louis XVI, estampillé Claude Topino, est estimé de 80 000 à 120 000 €. Un bureau à cylindre en acajou moiré d’époque Empire, estampillé Jacob est estimé de 60 000 à 80 000 €.
Et encore des objets incroyables comme cette paire de vases Médicis en porcelaine de Sèvres ( l’un est daté de 1811) peints et signés par Jean-François Robert. Napoléon Ier les avait offerts à son frère Jérôme, roi de Westphalie, le 13 février 1812. Ils sont estimés de 500 000 à 800 000 €… On ne saurait oublier, plus proches de notre époque, les flacons ou vases de verres de Maurice Marinot ( 1882-1960) – estimés quelques milliers d’euro chacun - qu’ affectionnait particulièrement François Fabius.
JB.
Le catalogue contient une préface de Armelle F. Fabius
VOIR: http://www.sothebys.com/fr/auctions/2011/collection-fabius-pf1124/overview.html
RÉSULTATS :
Pour les 400 lots, un total de é 9,6 millions d'euros a été obtenu (frais compris),
Records: Jean-Baptiste Carpeaux (936.750 euros avec frais pour "Jeune fille et Pêcheur à la coquille"), Antoine-Louis Barye (756.750 euros pour "Eléphant"), Claude Gillot (150.750 euros pour le dessin "Célébration en l'honneur du dieu Pan") et Théodore Deck (36.750 euros pour un grand vase).
Par enchère au téléphone, le Metropolitan Museum de New York a emporté à 983.150 euros (avec frais) une paire de vases Médicis en porcelaine de Sèvres, l'un daté 1811, peints et signés par Jean-François Robert. Cette paire avait été commandée par l'Empereur Napoléon Ier et livrée à son frère Jérôme. L'estimation haute était de 800.000 euros.
"Le résultat atteint par cette collection légendaire a été à la hauteur des attentes et pulvérise les précédents records pour des ventes de sculptures du XIXe siècle organisées jusqu'alors principalement à New York ou à Londres", a souligné Guillaume Cerutti, Président de Sotheby's France.
Les principales enchères provenaient de France, d'Europe mais également du Moyen-Orient, des Etats-Unis et d'Asie.
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 20 autres membres