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« Diagonale des Arts » de Cahors : « Glissements 2 »


 

 

 

       Pour la neuvième fois Cahors déploie sa biennale d’Art contemporain. Jusqu’au 15 mai, la petite ville si  tranquille du Sud-Ouest, à égale distance - cent kilomètres -  de Toulouse vers le sud, et de Brive-la-Gaillarde vers le nord, dans ce département du Lot que les trains de la SNCF tiennent  encore à près de six heures de distance de Paris, donne  sa place à l’art d’aujourd’hui dans quatre lieux: l'Espace Caviole, la librairie Calligramme, le Grenier du Chapitre, la Chantrerie .

 

       L’art de la photographie la plus innovante y avait,  voilà quelque vingt ans, dévoilé ses maîtres sous l’impulsion de Marie-Thérèse Perrin et avec le soutien d’Alain-Dominique Perrin, ( alors Pdg de Cartier ), propriétaire du château de Lagrézette et grand maître de la Confrérie des vins de Cahors : c’était « le Printemps de la photo ». La manifestation de renommée mondiale,  hélas, est partie pour Toulouse où elle se déroule désormais… en septembre.

 

       La « Diagonale des Arts » de Cahors a pris le relais culturel en proposant, comme elle le fait tous les deux ans,  des expositions d’ artistes « tous médias », venus de tous les horizons et de toutes les latitudes. « Loin des courants et des paradigmes de l’orthodoxie artistique, c’est l’univers de la découverte que privilégient les artistes et les organisateurs » explique très justement le jeune maire de Cahors, Jean-Marc Vayssouze-Faure.

 

       L’intérêt de la « Diagonale des Arts » est précisément dans la diversité qui s’offre aux regards. « À travers les pratiques et les matériaux multiples mûrement choisis par les artistes : peinture, vidéo, cinéma, photographie, son, et parfois leur interaction, Glissement 2 réunit des œuvres férocement singulières formant un spectre ample appartenant à l’archipel de l’art élaborées par des artistes explorant sans entrave toutes les possibilités qui leur sont offertes » précise le président de la manifestation, Claude Postel. 

 

 

       Quatorze artistes ont été retenus pour la biennale 2011. Il y en a pour tous les goûts. Je n’ai développé pour nourrir ma chronique que le travail de ceux qui étaient, en ce moment du mien. Même si à tous je reconnais des savoir-faire, des idées, des réalisations de très haute qualité. Question de sensibilité, de moment.

 

 

       Voici donc mon palmarès, mes choix, si tant est qu’ils aient du sens pour quiconque autre que moi. Mais après tout, ici, j’ai tous mes droits. J’en profite.

 

 

 


 

  J’évoquerai d’abord Marie Lepetit qu’un hasard des plus heureux m’avait fait rencontrer à Paris, rue Saint-Martin, entre la rue aux Ours et la piazza Beaubourg, alors qu’elle traçait sur le pan mur qu’un café sympathique offre comme espace d’expression à des artistes, les lignes de force d’une de ses créations qui allait vivre ici plusieurs mois sans être dégradé par quelque graffiti. Elle m’avait expliqué son propos et j’avais écrit alors sur mon blog un papier sur ce travail singulier. ( Voir : https://monoeilsurlart.blog4ever.com/blog/lire-article-350977-1822356-marie_lepetit__acupuncture_celeste.html  ). C’est donc avec plaisir que j’ai découvert que cette artiste venant à Cahors où je me trouve en ce moment, y présentait deux grandes œuvres et y donnait une conférence. Elle y a révélé le processus de son travail, l’usage de l’équerre, ou plutôt d’équerres de toutes dimensions, lui permettant de tracer les lignes dont les entrecroisements génèrent les points qui émaillent ses plans. Parfois Marie Lepetit établit des maquettes. L’une d’elles a été acquise par l’ « Artothèque du Lot » et vivra ainsi sa vie de foyers en foyers. Ajoutant aux dimensions spatiales, l’artiste a incorporé la dimension temporelle, expliquant ainsi que certaines de ses œuvres, longuement conçues, élaborées, finalisées sur les parois de galeries, de Maisons d’art ou de lieux divers n’ont qu’une vie éphémère. Après avoir été admirées par les visiteurs,  quelques semaines, quelques mois, elles sont vouées à disparaître. « Nous mêmes ne sommes que de passage »…

 

 

 


 

       Dans ses photographies grand format à la technique parfaite, Delphine Balley, nous raconte, mises en scène par elle-même,  les histoires étranges, tressées ou emmêlées, de personnages inquiétants sortis de l’imagination d’une Agatha Christie nourrie d’Anne Radcliffe. C’est en Irlande, à Dublin, où elle était en résidence au Musée d’Art moderne en 2006-2007 qu’elle a réalisé la série. Elle développe le thème dans son site internet:  « L’héroïne à la tresse (Ursula), l’aînée d’une fratrie de 3 filles, est cloîtrée dans la maison familiale, surveillée, dominée par sa mère (Margaret) toute puissante, à l’image de cette époque rigide née de la première révolution industrielle, étouffant dans son puritanisme bourgeois. Ainsi, 11, Henrietta Street, a pour trame ce temps immobile, lent et lourd d’une tresse qui pousse à l’infini et pour acmé la mère coupant la tresse… » En 2009, Delphine Balley avait concocté  une série de photographies de scène de crime pour illustrer un dossier pour « Le Monde 2 » intitulé " Le goût du crime ", publié en juillet 2009.

 


 

 


      

       Damien Comment, est peintre et dessinateur. Il vit et travaille à Bâle, en Suisse. Ses dessins ou ses tableaux, réalisés sur des feuilles de plastique, avec une maîtrise  consommée du non-finito, sont des portraits, des moments de vie, de brèves histoires que l’imagination invite à compléter. Son univers est masculin pluriel.  Il y trace son sillon dans la lignée d’Andy Warhol, de David Hockney – héritiers , ne l’oublions pas, de Dominique Ingres et de Pablo Picasso dessinateur – mais aussi d’un Marc Desgrandchamps qui ajoute aux évocations du trait les parfums d’un sacré mystère.

 


 

       Éric Corne est un artiste de la galerie parisienne de Patricia Dorfmann. Dans un entretien avec sa galeriste, il donnait quelques clés de sa peinture :  « La tactilité, la matérialité de la peinture me sont nécessaires, mais aussi le sujet où j’essaie de retenir l’intensité de l’amour physique qui est le point de l’indicible, de l’intime. Il y a toujours dans mes toiles, un monde près de l’écroulement, à la dérive où des récits se croisent. » Là aussi, il faut s’aider de sa propre culture de sa propre fantaisie pour commenter in petto les images offertes.

 


 

       Vidéaste passée par « Le Fresnoy-Studio national des arts contemporains » institution dédiée à la création artistique audiovisuelle, école, lieu d'exposition, de production et de diffusion, située à Tourcoing dans l'agglomération lilloise, la coréenne Hee Won Lee, qui a été désignée pour obtenir le trophée de la « Diagonale », bénéficiera, l’an prochain, d’une exposition personnelle. Son installation « 108 » est composée de petites boites à musique  et d’un logiciel qui fournit lettre par lettre un texte poignant qui s’affiche sur l’écran bleuté.

 

       Il faut voir aussi, bien sûr ce que présentent les autres artistes. La Chinoise Xing Danwen, née à Xi’an,  photographie des maquettes d’immeubles habitées de petits personnages de fiction ; Oh Eun Lee, coréenne,  décrit en vidéo un univers glaçant ; Catherine Merlin recrée au dessin ou en sculptures de fer à béton peints  des paysages urbains stylisés ; Bernard Pourrière fait entendre les cui-cui d’oiseau absents des cages sensées les emprisonner ; Jean-Xavier Renaud sur des tableaux de grande surface évoque des scènes déroutantes ; Raphaëlle Ricol invite à partager son univers onirique et inquiétant ; Pierre Savatier fait vibrer ses photogrammes ; le Belge Emmanuel Van de Auwera restitue en trois dimensions les captures IRM de son cerveau ; le Palestinien Mohanad Yaqubi offre un court métrage de l’absurde où un homme mécanisé et tétanisé se heurte à tous les murs qui l’environnent et le retiennent prisonnier… 

 

 

www.delphineballey.com

www.damiencomment.ch

www.ericcorne.com

www.marielepetit.fr

www.oheunlee.net

www.navi-lee.blogspot.com

www.danwen.com

 

 



16/04/2011
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