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La chasse aux Androïdes ( 2003 )

La chasse aux Androïdes

Savez-vous qu’au XVIIIème siècle la France a connu une phénoménale prolifération d’androïdes ? Eh oui, c’est ainsi qu’on appelait alors ces automates prenant la forme de personnages humains et animés par de subtils mécanismes d’horlogerie. Ces automates, ces androïdes, objets de curiosité conçus par des artistes horlogers et mécaniciens sont, avec leur descendance des XIX ème et du XXème siècles devenus le centre d’intérêt d’un grand nombre de collectionneurs qui n’hésitent pas à en payer certains plusieurs dizaines de milliers d’euros. Il existe même un site internet créé par des aficionados,  « automates-anciens.com », qui s’est fixé pour but de « rendre hommage aux horlogers-mécaniciens de génie qui, dans l'Europe du XVIIIème et XIXème siècle, essayèrent de découvrir le secret de la vie en donnant naissance à des créatures extraordinaires d'une très grande complexité mécanique ». Et de citer les automates et androïdes de Vaucanson, les androïdes des Jaquet-Droz, les têtes parlantes de l'Abbé Mical, le faux automate et la machine parlante du Baron Von Kempelen, les automates à pendule des Maillardet, l’automate androïde de Kintzing, l’automate écrivain de Von Knauss, les automates truqués de Robert-Houdin, les automates "pygmées" de Stèvenard etc...Ce site, très riche déploie des trésors de connaissances sur ces objets magique.
Les pièces anciennes les plus rares ont certes pris leur place dans des musées comme celui de Neuchâtel en Suisse ou de Grenoble ou bien dans de solide et anciennes collections privées. Mais l’on en trouve encore, à des prix parfois très élevés, dans quelques ventes aux enchères très courues par les amateurs. La Gazette de l’Hôtel Drouot en a ainsi relevé une quinzaine au cours des derniers mois.
            Fête foraine
Le 13 novembre à Toulouse, chez Artcurial-Briest-Poulain-Le Fur, deux automates ont été adjugés : 3 000 euros ont été accordés au « Magicien » par Lucien Bontemps, fin du XIXème siècle , et 3 000 euros également au « Clown fumeur » par Lambert, tête en porcelaine et bouche ouverte, haut de 42 cm.. Le 1er février à l’Hôtel des ventes de Dijon, deux résultats étaient à relever : 9 600 euros pour un automate de la maisonVichy, figurant un « Clown assis sur un tabouret », avec un mécanisme fin XIXe. Un autre automate également du catalogue Vichy partait pour 4 500 euros. Le 22 mars, sous le marteau de Mes Lombrail-Teucquam , à l’Hôtel Ambassador, était présentée la « Fête foraine ». Cet automate à musique (90 x 90 x 60 cm) est formé d'une scène avec un fond à arcatures orientales, sur laquelle s'agitent 2 jongleurs et un chef d'orchestre, 2 clowns sont posés à l’avant et font office d'orchestre, tandis qu'un personnage assis sur une chaise à côté change de couleur de tête en se cachant derrière un drapeau agité par l'un des clowns. Cette pièce complexe.obtenait 15 000 euros Un automate mécanique à 7 mouvements de fabrication française, représentant un « Marquis fumeur » (haut de 90 cm) était vendue 8 000 euros. On pouvait acquérir pour le même prix un automate à musique de la maison Léopold Lambert, « L'Espagnole » (haute de 58 cm), agitant la tête et un tambourin. La tête caractéristique provient des établissements Jumeau, les célèbres créateurs de poupées. Une tabatière à oiseau siffleur, travail autrichien vers 1920 de la Walser Wald & Co, trouvait preneur à 6 000 euros soit à son estimation haute.
A Lyon, le 21 mai, Me Anaf présentait la « Collection  d’automates Paul Bocuse » : un exceptionnel rassemblement de dix automates électriques fonctionnant en 220 volts. Ils ont été construits voilà des années par les entreprises JAF à Paris et conservés depuis dans leur caisse d’origine par le grand Chef étoilé. Ces modèles représentent une série de personnages typiques : une « Danseuse Hawaïenne », avec son pagne en fibre de coco et son collier à fleurs, le « Roi  Lyon » tenant dans sa main droite un sceptre,, un « Mandarin Chinois » à longues moustaches, un « Ours Blanc », un « Sévère Garde-Champêtre » avec képi , sabre et baudrier, un « Jeune Page », le « Diable Cornu », une « Jeune Asiatique » qui s’étend gracieusement avec son éventail, le « Clown à  la Perruque Rousse ». Et, on aurait pu y penser : un cuisinier. Ce « Cuistot Hilare », haut de 70 cm., bouge la tête, remue ses yeux en verre. Son buste se tourne par rotation latérale. Ses vêtements d’origine (blouse de chef, toque et  chaussures vernies) sont en parfait état. Il a été adjugé 1600 euros.   Le Clown atteignait pour sa part 1100 euros.  
    Mais la vente la plus copieuse et sans doute la plus variée et intéressante s’est tenue le 18 mai à Chartres par l’entremise de la société de ventes Lelièvre-Maiche-Paris, dont les spécialités vont de la photographie ancienne et des appareils de photo aux poupées, aux automobiles en modèle réduit et aux trains électriques. Lors de cette dernière vente dans une conjoncture où la hausse du dollar tient les Américains assez loin les enchères ont été nombreuses 115 lots vendus sur 130 proposés dans la section automates musique mécanique. Ainsi pour 2 800 euros on pouvait emporter une « Femme endormant son enfant », tête en porcelaine, mains en biscuit, mouvement des yeux de la tête et des deux bras de la maison Lambert. Pour 4 000 euros, « Le Mousquetaire », de Gustave Vichy vers 1880, tête en biscuit pressé et modelé. Il avance en levant le bras armé d’un pistolet. Il fallait compter 11 500 euros pour se voir adjuger « Le beau singe fumeur » de Gustave Vichy ( fin du XIX ème siècle) Mouvement de la bouche, des paupières, de la tête et des bras. Plus élevée encore l’enchère obtenue pour « La coquette à sa coiffeuse » de Gustave Vichy, dans un superbe état d‘origine. Adjugée : 17 000 euros. Debout elle regarde dans son face à main, puis se penche au dessus de sa coiffeuse en se mirant dans la psyché. Après plusieurs mouvements elle se relève et s’examine. Musique. La plus belle pièce de cette galerie d’automates, estimée de 50 000 à 70 000 euros, le célèbre « Pierrot écrivain » de Gustave Vichy n’a pas été emporté. Il s’agit pourtant d’une pièce décrite dans tous les ouvrages spécialisés. Pierrot termine sa correspondance, il s’endort, sa lampe s’éteint, il s’éveille, tend le bras pour lever la mèche, la lampe se rallume, il tourne la tête, meut ses paupières et se remet à écrire. Un exemplaire similaire figure au musée de Monaco (collection de Galéa) un autre dans la collection de Juliette Gréco. Prochaine vente d’automates à Chartres en décembre.



 ENCADRE  1 La fièvre du Tout Paris

Les plus anciens automates remontent à l’Antiquité.  Les Egyptiens, les Grecs, les premiers royaumes arabes en avaient inventé pour le plaisir des princes et l’animation mystérieuse de cérémonies. Mais c’est le XVIII ème siècle, en France, qui connut l’apogée de l’imagination et le l’inventivité. L’un des plus célèbres automates fut un « Satyre joueur de flûte traversière », grandeur nature, (1m78), inspiré du sculpteur Coysevox,  exécutant douze mélodies. Il avait été imaginé et construit entre 1735 et 1737 par celui qui deviendra l’inventeur du métier à tisser mécanique, Jacques Vaucanson. Ce génie créa bien d’autres automates : un berger provençal muni d’un galoubet et d’un tambourin qui pouvait exécuter une vingtaine d’airs ou bien ce canard demeuré mythique qui s’ébrouait dans l’eau et happait de son bec des graines qu’il expulsait ensuite…Ces chefs d’oeuvre qui avaient fait affluer le Tout Paris huppé de l’époque à l’Hôtel de Longueville où ils étaient exposés, puis des publics encore plus enthousiastes lors de tournées à travers l’Italie et l’Angleterre ont hélas disparu dans des incendies au XIX ème siècle.
        Particulièrement connues sont aussi les créations des horlogers mécaniciens Pierre et Henri-Louis Jaquet-Droz : un dessinateur qui dessinait, un bambin écrivain qui traçait des lettres, une musicienne jouant au piano une dizaine d’arias et dont la poitrine se soulevait au rythme d’une respiration parfaitement restituée. Citons aussi cette merveille que l'on peut toujours admirer à Paris, au Musée du Conservatoire national des Arts et Métiers, La joueuse de tympanon, réalisée par l'horloger mécanicien Pierre Kintzing et l'ébéniste David Roentgen  Acheté en 1785 par la Reine Marie-Antoinette, l'automate, représente une jeune femme élégamment vêtue d'un corsage décolleté et d'une ample robe à paniers en soie brodée. Assise sur un tabouret, la musicienne frappe avec des baguettes pourvues à leur extrémité de petits marteaux plats, les 46 cordes délicates d'un tympanon, instrument de musique d'origine tzigane. L’automate interprète huit airs différents dont un morceau de l’Armide de Glück.
Sur cette lancée brillante, le XIX ème siècle fut aussi très fécond. « On vit alors se multiplier d’innombrables androïdes : violonistes, pianistes, écrivains, magiciens,  escamoteurs, clowns, funambules, acrobates, magnétiseurs, poupées mimant la nourrice, tricoteuses, ou fumeurs de narghilé…Créés par de grandes marques de l’époque, Roullet, Lambert, Phalibois, Vichy, Bontemps…ces automates se retrouvent pour certains aujourd’hui sur le marché de l’antiquité », explique Jean Bedel , auteur du Dictionnaire des Antiquités chez Larousse.




SUJET No 2

La grande folie des petites collections
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La saison s’y prête . C’est, dans toute la France (et même ailleurs), celle des vide-greniers, des brocantes et des ventes aux enchère d’été …C’est aussi le temps des voyages liés aux vacances et des incursions gourmandes chez les antiquaires des régions les plus diverses.  Cette volée d’occasions permet à chacun de fureter tous azimuts pour nourrir une de ces petites passions qui font le charme de l’existence. « Entrez dans ma folie, j’entrerai dans la vôtre ». Allons-y…
Il y a dans chacun de nous un collectionneur qui sommeille ou qui s’éveille. Mais plus encore, et sans compter les grands classiques : tableaux, livres, sculptures… , tout objet, ou presque, porte en lui le germe d’une collection. L’imagination n’a pas de borne. Une cote pour ces objets ? Pas vraiment. Des prix oui. Selon les marchands et selon les opportunités. Tenter de faire une bonne affaire est la règle. Des deux côtés. L’Argus Valentine’s relève les enchères atteintes par certains de ces objets. Des stylos à 4 225 euro mais aussi à 237 ; des tire-bouchons à 280 euros, à 462euros.. ; ( argus Men Only).  Des décorations à1 342 euros ( une croix de la Légion d’Honneur de1804 vendue par PIASA en 2001), des clés à 305 euros, à 107 euros. ( Argus Antiquités)…Au petit bonheur la Chance . A vous de jouer.
Plaques émaillées, éventails, boîtes en fer, tire-bouchons, étiquettes de vin, pipes, couteaux de poche, autos miniatures, petits soldats, trains électriques,  boules à neige, miniatures de parfum, poupées de pays, montres, briquets, stylos à plume,cartes à jouer, lunettes, médailles et décorations, outils, billets de banque…Chacun de ces thèmes, a déjà suscité chez Flammarion la publication d’un épais petit ouvrage ( 380 pages) de format carré, très bien documenté. Le livre est  illustré de  quelque 400 grandes et belles photographies commentées d’objets provenant choisis. Cette collection d’une bonne vingtaine de titres pour le moment, sous le titre générique La folie des…, est parfaitement dans l’air du temps.
Certaines revues se sont créées sur ce créneau porteur comme Aladin ou Antiquités-Brocantes qui déclinent au fil de leurs parutions les séries d’objets de convoitise, les  trouvailles les plus sympathiques, les pistes à explorer et indiquent des références ainsi que les calendriers de ventes de proximité.
Les Editions du Chêne publient pour leur part depuis 1998 une sympathique  collection de petits livres rédigés par des spécialistes, Les carnets du Chineur, très bien conçus et illustrés, bourrés de conseils et agrémentés d’un utile carnet d’adresses. Déjà publiés : Les arts de la table français, Les années 50, Kitsch, Les objets de Bretagne, Les poupées, Les objets de Provence. D’autres sont à venir….  




Publié par Le Figaro   ( 2003 )


02/10/2009
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